LES TRIBUNES MOBIL’IS épisode 2 – Aménagement du territoire et mobilités

Ancien directeur du SCot Grande Région de Grenoble, aujourd’hui
délégué Mobilités à la Ville de La Tronche, Philippe Auger questionne pour Mobilis le rapport étroit entre mobilités et aménagement du territoire.

 

Il y a un rapport étroit entre mobilité et aménagement du territoire.
Peut-on imaginer un territoire des courtes distances ?

Philippe Auger. Des courtes distances pour des pôles de vie rendus plus autonomes alors qu’ils se construisaient depuis longtemps dans la dépendance par rapport au centre de la région. Sur un territoire comme le nôtre qui mixe de l’urbain dense, du péri-urbain , de la montagne, les réponses sont bien sûr diverses mais toutes doivent s’articuler pour construire une offre cohérente
garante d’une développement soutenable. C’est une évidence de dire que notre
territoire s’est construit autour de la voiture individuelle qui offrait de multiples avantages mais présentait aussi des contraintes réelles. L’objet des politiques d’aménagement a été de rendre moins nécessaires les
déplacements contraints par l’éloignement des lieux d’emplois, de logements, de services en rendant les pôles de vie plus autonomes. De même un quartier du centre-ville par la proximité des fonctions génère évidemment un besoin de mobilité satisfait plus facilement par les modes doux ou les transports en commun. En résumé la politique de mobilité ne vise pas à satisfaire séparément chaque catégorie d’usager mais à offrir un “panier” de moyens de mobilités garant de choix cohérents.

 

Il faut donc penser temps
plutôt que distance ?

S’affranchir de la distance par le temps gagné a permis cet étalement de l’urbanisation. En est issu un monde qui frôle aussi l’embolie. Il faut donc donner une « vitesse d’horloge » à nos territoires qui conjugue fiabilité du temps de parcours et maintien d’un temps de parcours qui laisse à distance
des pôles que l’on souhaite voir s’autonomiser. Il faut agir sur les temps parce que le temps et la fiabilité de ce temps de parcours sont un critère majeur pour décider d’utiliser tel ou tel mode de déplacement.

 

D’autant plus qu’au temps et à la distance s’ajoute le relief…

Si nous étions à Paris ou New York, nous n’aurions pas les mêmes problèmes. Ici, nous avons la distance et le poids du périurbain, construit avec la voiture. Le relief n’aide pas… La voiture a donc toujours son utilité. Mais la question est : “Comment on l’articule ?” A cet égard, la ZFE est assez illustrative d’une volonté de lutter contre la pollution de l’air générée par les véhicules thermiques tout en permettant aux territoires de s’appuyer sur la voiture décarbonée. Mais comment réguler l’usage de la voiture à proximité des bassins d’emploi et des hyper-centres qui concentrent les services ? Les usagers comprennent l‘objectif sanitaire de la ZFE et, dans le même temps, ils comprennent la difficulté liée soit au renouvellement, soit à l’usage alternatif à la voiture. Pour cela, les mesures d’accompagnement sont indispensables,
même si elles ont leurs limites. Mais entre ne rien faire et proclamer une interdiction du thermique, il y a un chemin de crête qui permet de maintenir la pression pour basculer vers une mobilité décarbonée ; et pour affronter la question de la pollution qui génère de vrais dégâts sanitaires.

Aménagement du territoire et mobilités L’EXPERT MOBIL’IS
Philippe Auger a mené une carrière dans le développement territorial au sein de sociétés d’aménagement et du Parc du Vercors ainsi que dans la planification au sein de l’Établissement Public du SCoT de la Grande Région de Grenoble.

Mobil’is est le réseau des acteurs promouvant les mobilités innovantes en Isère.
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